Nous sommes 68% de Français à considérer nos animaux de compagnie comme des membres de la famille à part entière (source Ipsos), car ils occupent une place toujours plus importante, voire indispensable, pour nombre d’entre nous : pour 99% ils sont sources de bonheur, pour 95% ils sont un rempart contre la solitude et pour 80% contre le stress (source Weenect). 30 millions d’amis a même mis en place son classement des villes où il fait bon vivre avec son animal, mobilisant les élus dans le nouveau rôle de délégués à la condition animale.
Depuis 10 ans qu’ils sont reconnus « êtres vivants doués de sensibilité » dans le code civil, mais toujours « soumis au régime des biens », nous nous questionnons sur l’évolution de leurs droits et protections, telle Isabelle Doussan, directrice de recherche à l’INRAE de l’université Côte d’Azur.
Comme la chasse à courre, la corrida ou les combats de coqs perdurent, considérons que notre société évolue lentement mais sûrement en faveur des animaux, et de la reconnaissance de notre sensibilité à leur vie. On se souvient à ce titre du livre de Hélène Gateau « pourquoi j’ai choisi d’avoir un chien (et pas un enfant) » qui plaide pour l’affirmation d’un lien affectif puissant interespèces.
Assumer d’aimer un animal, jusque dans la maladie et la mort
Depuis mars 2025, une première entreprise hors du secteur animalier (PEP Grand Oise) accorde à ses salariés un jour de congé payé… pour deuil animalier. Ainsi, puisqu’il est accepté que partager sa vie avec un animal offre véritablement du bonheur, il devient légitime de considérer les autres aspects de ce type de relation, dont la douleur de la perte.
« Quand le vent se lève » de Guylène Thiébaud (Le lys bleu éditions) ajoute une pierre à cette réflexion, avec un témoignage terrible sur les conséquences de maladies de nos animaux, pour eux comme pour nous. Comment gérer les frais de santé, les absences au travail, les soins à donner à toute heure du jour et de la nuit ? A quel point peut-on impliquer les autres membres de la famille, les amis ? Quels choix faire face aux injonctions contradictoires des vétérinaires, qu’ils soient d’obédience allopathique ou « alternative » ?
« Les congés pour chiens malades, les indemnités pour aidant familial canin, ça n’existe pas ! »
En devenant l’aidant d’un animal, chacun est livré à son sort. L’euthanasie ou l’abandon deviennent des hypothèses sérieuses que certains franchissent. Incapable de capituler malgré toutes les épreuves qu’elle traverse pour ses deux chiens, en particulier Patxi (prononcer « Patchi »), épileptique, dont elle se sent « flamme jumelle », Guylène Thiébaud lutte par tous les moyens pour trouver des réponses, jusqu’aux frontières de l’irrationnel, et du soutien, jusqu’aux limites de son corps et de son âme.
Pour partager et recevoir de l’empathie, pour parer les faux experts et les vrais escrocs qui utilisent la détresse humaine dans un but mercantile, elle a créé Humany’Pat, « une communauté dont l’objectif est de mettre en relation des humains qui se préoccupent de la santé de leurs animaux malades ou qui souhaitent mettre en œuvre des mesures de prévention pour éviter la maladie de leurs poilus ». Et elle a pour projet de développer PatQi Care, une association qui organise la solidarité entre aidants, à l’échelle internationale.
« Je rêve que nous, humains, qui avons des poilus malades ou âgés, nous soyons reconnus comme des aidants à part entière, à l’instar de ceux qui soutiennent un membre de leur famille. » Yoann Latouche, qui signe la préface, appuie également ces démarches « pour tous ces gardiens de l’ombre, qui n’ont pas de « droit au répit », pas de « congé pour animal malade », mais qui, chaque jour, sacrifient une part d’eux-mêmes par amour. »
« On peut juger de la grandeur d’une nation et ses progrès moraux par la façon dont elle traite les animaux » disait Gandhi. Nous avons encore un long chemin à parcourir.
